J’ai décidé de ça-voir autant que de savoir

Aujourd’hui, je vous partage un texte personnel, et une proposition de lecture…

« Il a deux ans et demi. Il est plein de vie, d’envies, de folies. Petit à petit, à dire « non ! » il s’est mis, à tourner la tête, taper des pieds, faire comme si de rien n’était.

Petit à petit, j’ai froncé les sourcils, haussé le ton, forcé la main. Parce que le temps manquait, parce que la patience manquait, et parce qu’il faut bien avoir un peu d’autorité et se faire respecter… Pensais-je.

On a combattu, on s’est débattus, on s’est accusés. Jamais bien violemment, mais pour moi déjà trop, en fait. J’ai réalisé, soudain, ce qui se passait-là. Ce n’était pas par cette émotion-là que j’étais traversée. Ce n’était pas de cette relation-là dont j’avais pu rêver. J’ai décidé, soudain, de refuser l’autorité qu’on nous a si facilement enseignée. Non, je ne veux pas user de la menace pour faire faire, pour convaincre ou contraindre. Non, je ne veux pas jouer du rapport de force pour faire manger, faire apprendre, faire ranger, avec personne et encore moins avec lui. Non, je ne veux pas le dominer, le soumettre, même juste par les mots. Je choisis de me mettre à sa hauteur. Je choisis de me mettre à son écoute autant qu’à la mienne, de voir le monde à travers ses yeux autant qu’à travers les miens. Je choisis la fermeté sans l’autorité, d’expliquer le pourquoi du comment, même succinctement, de répéter autant que nécessaire la consigne de ce à quoi il ne pourra se soustraire. Calmement. Posément. Je choisis de ça-voir autant que de savoir. Je pose un cadre qui, je le sais, est bon pour lui. Pour sa sécurité. Pour son hygiène. Pour son apprentissage de l’altérité. Et dans ce cadre, je m’attache à voir, seulement voir, comment il évolue, comment il crée, comment il grandit. Je choisis de ne pas feindre une colère qu’au fond, je n’ai pas au fond de moi. Au fond de moi il y a tant de tendresse et d’admiration pour tous ces efforts qu’il fait déjà, de la lassitude parfois, de la fatigue souvent, mais pas de la colère. Aucune envie de dominer. Et vous savez quoi ? Le pire, c’est que ça marche… »

#DireL’intimePourUneFemmeC’estPolitique

Il se trouve – hasard ou synchronicité – que j’ai découvert, en même temps que j’écrivais ce texte, le livre « Empathie ; Manifeste pour une révolution » (si si, je vous jure…) de Roman Krnaric.

Il me semble faire écho à mon texte, et à la réflexion qui y est associée. Au-delà de la question « Qu’est-ce que l’empathie ? », et de son influence sur les relations interpersonnelles, l’auteur s’interroge sur sa contribution plus large aux changements de société. Il livre également ce qui lui est apparu, au cours de son parcours et de ses recherches, comme les conditions de son développement. Le livre explore sa principale découverte chapitre après chapitre, à savoir que « les personnes très empathiques ont toutes quelque chose en commun. Elles cultivent intentionnellement six habitudes »… résumées de la façon suivante :

Habitude 1 : Activer la zone empathique de son cerveau
Changer sa façon de penser pour reconnaître que l’empathie se trouve au cœur de la nature humaine et qu’il est possible de la développer tout au long de sa vie.

Habitude 2 : Faire un effort d’imagination
Faire un effort conscient pour se mettre à la place de l’autre, y compris de son « ennemi » pour reconnaître son humanité, son individualité et son point de vue.

Habitude 3 : Rechercher des expériences et des aventures
Explorer des vies et des cultures différentes de la sienne, dans le cadre d’une immersion directe, d’un voyage empathique ou de coopération sociale.

Habitude 4 : Pratiquer l’art de la conversation
Être curieux des étrangers, savoir écouter, faire tomber le masque émotionnel.

Habitude 5 : Voyager dans son fauteuil
Se transporter dans la tête des autres via les arts plastiques, la littérature, le cinéma et les réseaux sociaux.

Habitude 6 : Inspirer une révolution
Générer de l’empathie à grande échelle pour créer un changement social et étendre sa capacité d’empathie à la nature.

1 commentaire

  1. Bien vu Elise le parallèle entre ça-voir et savoir! Autant à l’âge de nos bambins qu’au nôtre! 😉 ça me paraît avoir beaucoup de sens également dans notre pratique de la facilitation.
    Je vois que nous sommes nombreuses (je garde le féminin car je trouve que ça vient souvent des mamans dans les couples de mon entourage cette réflexion, même si beaucoup de papa y sont également sensibles…après une petite entreprise de conviction!), nombreuses donc à nous interroger sur notre manière d’être parents et, finalement, à trouver les ressources pour remettre en question les stratégies éducatives que nous avons nous-mêmes vécues étant enfants. Je suis convaincue que la société changera difficilement dans le sens d’une « révolution relationnelle » et « empathique » si elle ne change pas aussi, et même d’abord, dans son rapport aux bébés et à l’enfant…Vaste sujet qui me passionne, j’espère que j’aurai l’occasion d’en discuter avec toi!
    Et merci pour ce joli partage.
    :-*

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