C’est imaginer des récits pour devenir pleinement auteurs et autrices des transitions socio-écologiques :

Mettre des mots sur les transitions, pour les incarner pleinement

Les transitions appellent de nouveaux récits, afin de se replacer dans une histoire tenant compte du passé tout en ouvrant des perspectives positives d’avenir. Le récit de la modernité, pourvoyeuse de bonheur et d’épanouissement par la consommation et la production de biens matériels, atteint ses limites, à la fois pour l’être humain et pour le vivant en général. Face aux dérèglements climatiques, aux crises sanitaires et sociales, au déclin de la biodiversité, quels récits (se) raconter à l’échelle globale pour que l’avenir reste attractif, et pour opérer les transitions nécessaires ? A l’échelle individuelle, les grandes transformations actuelles rebattent les cartes également : comment trouver sa place dans un système qui se reconfigure, et comment se raconter dans des situations mouvantes et imprécises ? Comment parler de son métier ou de son projet lorsque celui-ci est complexe ? Comment (re)définir son identité professionnelle, lorsque les codes du travail se déplacent ? Comment surmonter une épreuve ou une difficulté lorsque les mots manquent pour en parler ?

Ces récits ne peuvent être uniquement techniques, scientifiques et analytiques. Parce que les défis du XXIe siècle sont complexes, les solutions doivent être co-construites, elles doivent « tenir compte » de la diversité des avis d’un ensemble d’acteurs divers, et semblent davantage résulter d’accords et de décisions prises ensemble, c’est-à-dire de choix humains et de prises de risque assumées, que d’évidences absolues. Cela implique de réinvestir la subjectivité humaine au service de ces projets de développement, dans ses dimensions relationnelles (faire vivre des collectifs et des communautés de décisions et d’actions), intuitives (agir dans l’incertitude) et créatives (innover, trouver de nouveaux modèles et modes de vie, de production et de consommation). Autrement dit, cela implique de mobiliser toutes les intelligences humaines.

Il me semble que la mise en récits, et en particulier la mise en contes, peut aider les acteurs des transitions écologiques, agricoles, alimentaires, sociales, rurales, à opérer leurs transformations, et à mieux penser, décider et faire ensemble. Si tout reste à inventer et à construire, les ressorts du conte apparaissent comme une aide précieuse pour mobiliser l’ensemble de leurs intelligences pour co-construire des réponses aux enjeux actuels du vivant.

transitions socio-écologiques

« La transition socio-écologique est une notion polysémique qui renvoie à plusieurs interprétations possibles des relations entre les sociétés et leur environnement. Évoquer la possibilité d’une transition socio-écologique conduit à s’interroger sur nos manières de produire, de consommer et d’urbaniser, à l’aune des relations développées par les individus et les sociétés aux milieux naturels et construits. Dans un monde qui connaît d’importantes mutations écologiques (changement climatique, perte de biodiversité…), la transition implique une conscience des responsabilités et un pouvoir d’agir des sociétés vis-à-vis de ces mutations.

C’est pourquoi nombreux sont ceux qui caractérisent la transition par un engagement des acteurs citoyens, associatifs et économiques dans des initiatives locales proposant de nouvelles façons de reconnecter les pratiques de vie aux milieux écologiques et plus largement aux cycles des matières, de l’énergie et du climat.


Toutefois, la transition est multiforme et peut emprunter de multiples chemins, selon les acteurs qui se mobilisent, les milieux urbains, culturels, socio-techniques et politiques dans lesquels elle émerge. Parmi les courants scientifiques qui analysent la transition, certains insistent sur la contribution du citoyen et des acteurs territoriaux à une résilience locale (Hopkins, 2014). D’autres mettent l’accent sur l’émergence de niches d’expérimentations (Geels, Schot, 2007) qui, lorsqu’elles s’agrègent et rencontrent un milieu d’acteurs multi-niveaux, peuvent se mailler à d’autres initiatives et ainsi contribuer à faire évoluer les trajectoires socio-techniques, (par exemple dans la décentralisation énergétique). D’autres courants enfin concentrent leurs analyses sur l’évolution des systèmes culturels, des modes de vie, et les changements institutionnels nécessaires à la mise en mouvement de la transition dans les sociétés (Rotmans, Ficher-Kowalski, 2009). »


Initiatives citoyennes et transition écologique : quels enjeux pour l’action  publique ?
Commissariat Général au développement durable (CGDD)

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Pourquoi le conte ?

Parce qu’il est un récit complexe alliant la liberté de l’imaginaire et le cadre d’une structure. Un héros, ou une héroïne, suit un chemin de transition depuis une situation initiale, dans un territoire spécifique, jusqu’à des voies de résolution, et cela en passant par des événements perturbateurs, l’identification d’une quête, la rencontre d’obstacles et de monstres, et la recherche d’alliés et autres objets magiques pour l’aider dans sa transformation. Tout ce que l’on traverse lorsque l’on chemine dans les transitions socio-écologiques !

Ainsi, faire un détour par le monde magique du conte permet de :

  • mettre en récit, c’est-à-dire poser des mots sur une expérience complexe (une activité, son métier, un projet…), et en parler plus sereinement
  • (re)trouver du sens et de la cohérence dans son parcours et ses projets, en particulier lorsque l’on est en transition (de vie et/ou professionnelle)
  • prendre une juste place dans un projet à plusieurs
  • mobiliser toutes ses intelligences, aussi bien rationnelles et analytiques, qu’intuitives et émotionnelles, pour avancer
  • faire le lien entre le passé (bilan), le présent (vécus) et le futur (projets) et ainsi (re)devenir auteur.rice de sa vie

Il s’agit de communiquer autrement avec soi-même (réflexivité, écoute de soi), avec les autres (s’exprimer plus sereinement) et avec le monde (clarifier sa place et ses intentions)

auteur.rice

du latin auctor qui signifie « instigateur »
dérivé de augere qui signifie « faire croître »
plus tard : « écrivain par rapport à son oeuvre » et « personne qui est la cause de, qui fait (qqch) »

Une publication très inspirante !

Repères sur la mise en récit(s) de vos projets de transitions
CERDD (Centre Ressource du Développement Durable)


Extraits :

« Au coin du feu, sous l’arbre à palabres, au bord du lit des enfants, sur les écrans, en chaque lieu où résonnent les combats politiques, nous nous laissons porter par des histoires. Elles dessinent des avenirs tantôt catastrophistes, tantôt idéalistes ou utopistes dans lesquels nous nous projetons. Si un avenir sombre peut générer l’angoisse et le déni et donc l’inaction, un futur désirable aura la puissance de mobiliser, et de donner envie d’être «acteur de son histoire». »

« Notre approche de la mise en récits des projets de transitions n’est ni statique ni limitée à une seule action ponctuelle, c’est au contraire un processus dynamique. Celui-ci donne lieu à une multiplicité de formes d’actions et de nombreux supports qui vont au delà de l’écriture. Au delà d’une forme de storytelling assumée, la mise en récits présente deux fonctions majeures : la mise en mouvement des acteur·rices et le pilotage coopératif des projets. Une mise en récits impliquante au service des projets de transitions précieuse par sa capacité à transformer les individus et les collectifs. »

« Raconter l’histoire vécue autour d’un projet de transition, c’est objectiver, à partir de l’expérience de
chacun·e, le chemin parcouru, évaluer les résultats, les impacts et démontrer leur existence et leur valeur. La mise en récits doit aussi s’attacher à décrypter, pour mieux les comprendre, les obstacles, les résistances, les échecs, dans une logique d’amélioration permanente. En montrant les hauts et les bas, les effets non linéaires d’une histoire, on en saisit mieux la complexité. La mise en récits permet ainsi d’attraper la dimension systémique d’un projet (voir encart ci-dessous) et d’en
repérer les externalités tout en les rendant lisibles et appropriables. Ce faisant, elle en révèle ses effets au-delà du premier périmètre considéré. »


« TOUT CE QUI COMPTE NE SE COMPTE PAS TOUJOURS MAIS SE RACONTE »

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Mes contes (créations personnelles)

Bibliographie :

Bedell, Céline, Coacher avec l’approche narrative

Berhault, Gilles & Dartiguepeyrou, Carine, Nouveaux mythes, nouveaux imaginaires pour un monde durable

Chouvier, Bernard, Le pouvoir des contes

Cyrulnik, Boris & Jorland, Gérard, Résilience, connaissances de base (de l’importance de la mise en récit pour surmonter une épreuve)

Debailleul, Jean-Pascal, La synchronicité par les contes, Une ouverture sur l’infini des possibles (« rien de moins que des clés d’agilité pour fonctionner dans l’incertitude, le grand défi de l’homme contemporain »)

Dechezelle, Alexandra & Stern, Maryse, Ma vie en contes, Écrivez vos légendes personnelles

Dion, Cyril & Laurent, Mélanie, Demain

Gilligan, Stephen & Dilts, Robert, Le voyage du héros, Un éveil à soi-même, avec le coaching génératif

Glissant, Edouard, Traité du tout monde

Gordon, David, Contes et métaphores thérapeutiques, Apprendre à raconter des histoires qui font du bien

Harari, Yuval Noah, Sapiens, une brève histoire de l’humanité

Hopkins, Rob, Et si… on libérait nos imaginaires pour créer le futur que nous voulons ?

Huston, Nancy, L’espèce fabulatrice

Jousseaume, Valérie, Plouc Pride, Un nouveau récit pour les campagnes

Midal, Fabrice, Narcisse n’est pas égoïste

Picard, Catherine, Contes et thérapie

Rivierre, Adrien, L’Homme est un conteur d’histoires

Socialter, Le réveil des imaginaires (hors-série)

White, Michael, Cartes des Pratiques Narratives